L’exposition collective de rentrée de la Maison des Arts fait sienne la célèbre affirmation d’Arthur Rimbaud « Je est un autre » qui explore les rapports intimes existant entre identité et altérité, ainsi que leurs liens avec l’acte créateur.

Le célèbre poète édicte là un principe éminemment moderne, éveillant en celles et ceux qui l’écoutent des gouffres de questionnements. La formule apparaît paradoxale : comment peut-on être à la fois « je » et « autre » ? Comment faire si « je » est en réalité une multitude d’« autres » ? Pour devenir poète, pour être créateur, conviendrait-il donc d’être multiple, d'adopter de nombreuses personnalités afin d’embrasser le monde et de le retranscrire fidèlement ?

La présente exposition n’a pas pour objet de répondre à ces questions, mais bien au contraire d’alimenter notre réflexion autour de l’ « autre » et du « je » avec chaleur et vérité, car s’il y a bien un fil rouge entre les cinq artistes présentés à la Maison des Arts pour la première exposition de la saison, c’est celui du goût de l’autre et d’une grande curiosité portée au « je » et à l’ « autre ».

 

La Maison des Arts a ainsi le plaisir d’accueillir Anne Bothuon qui réalise des sculptures textiles de ouate, de tissu, de gaze de tarlatane et de fils brodés, représentant une humanité d’une touchante vulnérabilité. Dans un style bien singulier, Marie Boralevi, réalise des dessins au crayon graphite et à la mine de plomb d’une maîtrise exceptionnelle. Ses portraits aux regards frontaux nous subjuguent par leur captivante beauté teintée d’étrangeté. Également maître dans l’art du dessin, Axel Roy scrute avec une grande tendresse la foule. Ses dessins racontent des histoires contemporaines, de celles qu’on a l’habitude de voir quotidiennement et dont la mise en valeur des figures par le travail de réserve (zones blanches laissées dans le dessin) rapproche entre eux des individus qui ne se connaissent pas, nous invitant à la découverte de l’autre. Ariane Külh questionne la norme et son impact sur la construction de l’identité. Ses œuvres sont peuplées de masques qui rappellent les sculptures d’Anne Bothuon et amènent à un questionnement sur les notions de norme et d’identité. Enfin, Hervé Bourdin, dans un style BD et caustique, propose une installation intitulée « mise en boîte ». Il présente des êtres humains coincés dans des boîtes de conserve comme une analyse à postériori des effets du confinement de 2020 : l’humanité, condamnée à se nourrir de conserve et recluse dans ces mêmes boîtes. 

Pour parachever cette magnifique exposition, des œuvres sont présentées dans le jardin pour le plaisir des promeneurs.

 

Texte d'Emmanuelle Cannavo